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L'art en espace public ?

Création artistique, Espace public et Politique

Chaque année davantage la politique culturelle de nombreuses villes s'orientent  vers une cible touristique; sans surprise et sans prise de risque, le patrimoine historique prend alors la plus large place.
Les villes riches d'un patrimoine architectural et culturel historique se transforment alors tranquillement en musée; certaines n'échappant pas à l'effet meringue. Car bien au delà des travaux de restaurations necessaires à la conservation patrimoniale et des évolutions indispensables à l'aménagement urbanistique,  le cœur des villes se voit entièrement revu et corrigé, parfois aseptisé. Monuments restaurés, trottoirs réaménagés, façades des habitations recrépies, mobilier urbain et voitures effacés. Agréable au quotidien certes, mais dans l'excès, si excès il y a, tout devient  rose-meringue, meringue crème et blanche meringue. Du nord au sud de la France,  la ville patrimoniale s'uniformise et dans se contexte, à l'échelle du quartier, peu d'écarts possibles, l'élément différent risque de contraster, dénote et tend directement ou indirectement à disparaitre.
Ainsi, sans aborder tout ce que cette simple orientation urbanistique peu révéler et induit sur l'évolution de la population résidente et de son profil social, qu'en est il de la place de l'art d'aujourd'hui dans ces espaces réhabilités, dans ces villes vivant de leur art passé. Quelles espaces pour la naissance et l'épanouissement
des cultures dans toutes leurs diversités. L'art en espace public se limiterait-il aux arts du spectacles,  généralement concentrés en saisons estivales sur les places de nos églises si joliment pavées ?

Rencontres-débats - Quand l'art trouble l'ordre public.

Depuis 2007, l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne via le Master Projets Culturels dans l’Espace Public propose un cycle de rencontres-débats sur l'art en espace public. Cette 4ème édition aborde par ses thématiques des questions  évoquées lors de leurs trois précédentes éditions. Une grande partie des débats est archivées sous forme de dossier, d'enregistrements audio podcastables, de vidéos. (1)

Le cycle 2010 vient ce vendredi 2 avril de s'achever. Des archives seront  prochainement consultables sur leur site internet (2). L'occasion alors de consulter l'ensemble des débats passés et notamment celui du 12 ème rendez-vous de la saison 2010 soulevant une question pertinente:   En quoi la création artistique en espace public est-elle politique ? Quand l'art trouble l'ordre public.

L'intervention artistique dans l'espace urbain vise parfois à troubler « l'ordre public ». À quelles nécessités ces projets répondent-ils ? Dans quelle mesure peuvent-ils être souhaités par les pouvoirs publics ? Nos sociétés policées sont-elles prêtes à les accepter ? Sont-ils solubles dans la société du spectacle ? Le débat sera engagé avec trois artistes. Jacques Livchine, « metteur en songe » du Théâtre de l'Unité, figure historique des arts de la rue, se présente comme « organisateur de désordre » ; Christine Bouvier, performeuse, dirige le festival « Préavis de Désordre Urbain » ; Caroline Amoros est l’auteure de Kristin, un spectacle de rue qui a fait l'objet d'une plainte pour « outrage à la République » et « dégradation de la voie publique », à Cuers en mars 2008. Julien Bargeton, conseiller de Paris, premier adjoint à la Mairie du 20ème arrondissement, chargé de la culture et des finances, participera également à la rencontre, ainsi qu'Agnès Tricoire, avocate à la cour, spécialiste en propriété intellectuelle, conseil notamment de l'artiste chinoise Ko Siu Lan dont une œuvre, accrochée en façade de l'Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris, a été censurée plusieurs jours début février. 
(Rencontre du Vendredi 26 mars 2010, 19h-21h, Paris)

(1) www.art-espace-public.c.la  ; http://masterpcep.over-blog.com
(2) Archives des cycles art [espace] public 200720082009. 














cHokinG !

Alors que ce billet dormait en attendant d'être achevé et publié sur Lorgnette, ce samedi 3 avril la presse locale fait écho au sujet précédemment évoqué.  Quelques parents d'élèves souhaiteraient l'effacement d'une peinture réalisée par l'artiste Fred Calmets dans le quartier de Montbernage à proximité de l'école catholique Sainte Radegonde (...face au calvaire).


 Prise de tête pour un crâne
L'artiste Fred Calmets a peint un crâne géant
à Montbernage. Des parents demandent qu'il soit effacé.


Faut-il effacer ce crâne que certains ne sauraient voir? A Montbernage, l'oeuvre graffée depuis trois semaines par l'artiste poitevin Fred Calmets a déclenché des réactions chez des parents d'élèves de l'école Sainte-Radegonde, voisine du mur d'expression libre où apparaît ce crâne géant. Il y a deux jours, le service propreté de la Ville de Poitiers, chargé du nettoyage des tags, a contacté Fred Calmets pour lui demander l'autorisation de l'effacer. L'artiste est tombé des nues et a refusé: « Je n'ai eu aucune réaction immédiatement. Au contraire, certains habitants sont venus me voir quand je peignais, pour discuter, sans préjugés. J'ai donc été très surpris de l'appel de la mairie. »

La tradition des vanités.

Surtout que Fred Calmets n'en est pas à son premier crâne. Comme de nombreux artistes avant lui, à travers les siècles, il développe le thème des vanités (représentations de crânes et squelettes évoquant la vanité de la vie), principalement à travers ses toiles (ndlr: il est d'ailleurs exposé à Londres), et en a déjà réalisé plusieurs sur d'autres murs d'expression de Poitiers.
Aujourd'hui, il ne cache pas son inquiétude et sonne l'alerte: « Ce sujet n'a aucun caractère morbide, au contraire, l'oeuvre est plutôt là pour parler de la vie. Les parents peuvent aussi expliquer cette problématique aux enfants: j'en parle moi-même avec mon fils de 6 ans et demi, qui détourne ces crânes pour jouer au pirate! Mais je ne juge pas la manière dont les parents éduquent leurs enfants. Simplement, moi aussi il y a des fresques que je n'aime pas sur certains murs, mais je ne demande pas à les faire effacer. Mon oeuvre ne porte pas atteinte aux bonnes moeurs et ne présente aucun caractère politique ou religieux. Ensuite, c'est aux élus de prendre leurs responsabilités vis-à-vis de la liberté d'expression. » Éliane Rousseau, adjointe au maire, ne dit pas autre chose: « On n'a rien à lui reprocher, ça fait partie de sa démarche d'artiste, mais on peut aussi entendre que ça choque certains. On ne va pas effacer ce crâne de nous-mêmes. La meilleure façon pour que chacun s'explique, c'est d'organiser une rencontre. On va proposer à Fred Calmets de venir dialoguer avec les parents, à la rentrée des vacances de Pâques. »
En attendant, Fred Calmets a déjà recueilli de nombreux soutiens, notamment via le réseau social facebook.

Elisabeth Royez - www.centre-presse.fr

Saluons sur cette question la solution de médiation proposée par l'adjointe au maire de Poitiers.

D'autres peintures de l'artiste sont visibles dans la ville ou sur son site :
www.fredcalmets.com  ENTRÉE LIBRE...

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